La parole au SNUEP-FSU

Réforme Macron des Lycées Pro

Le 4 mai 2023, le président de la République a commencé son allocution depuis un lycée professionnel à Saintes en s’appuyant sur un constat mensonger : les lycées professionnels vont mal parce qu’on ne s’occuperait pas d’eux, il serait donc grand temps de se pencher sur ce problème ! N’a-t-il jamais entendu parler de la réforme Darcos de 2009 ? Ni de celle de Blanquer de 2019 ? Sur le terrain, nous constatons pourtant combien elles ont pu porter atteinte aux formations et aux élèves des LP… Mais alors pourquoi encensait-il quelques secondes plus tard les dispositifs mis en place par Blanquer (co-intervention, chef d’œuvre, AP à ne plus savoir qu’en faire…) ? Sur quelles enquêtes s’appuie-t-il pour en tirer un tel bilan ?

Après cette introduction dans laquelle il a encore vanté la réussite de sa réforme de l’apprentissage (en s’appuyant sur des chiffres tronqués, et à coup de milliards d’euros depuis 2019), il a dévoilé les orientations de sa réforme de la voie professionnelle. Celles-ci étaient attendues depuis le mois de mars et la fin des « groupes de concertation » (auxquels la FSU a refusé de participer) mis en place par Carole Grandjean, Ministre déléguée rattachée au ministère du travail ET au ministère de l’enseignement. On a donc 12 mesures, détaillées dans un dossier de presse disponible sur le site de l’EN, qui regardées dans leur ensemble forment une usine à gaz pour détruire les lycées pro et livrer cet enseignement et ses élèves au privé.
Ces mesures et l’analyse qu’en fait le SNUEP-FSU sont détaillées dans un document disponible ici : https://snuep.fr/lycee-pro-12-mesures/carrousel/

Pour résumer, si on ne garde que quelques mesures parmi les plus emblématiques :
• La mesure 1 annonce une gratification des élèves pendant les périodes de formation en milieu professionnel (PFMP). Cette mesure démagogique peut apparaitre positive pour les élèves des LP, mais faire le choix de conditionner cette aide à l’effectivité des PFMP est un très mauvais signal. C’est une valorisation de ce qui se passe en dehors de l’école, et jette le discrédit sur le travail global effectué par les PLP. Cette gratification se fera grâce à l’argent public, ce ne sont pas les entreprises qui paieront. On aura donc des élèves pour la plupart mineurs qui iront réaliser pour la majorité d’entre eux des tâches subalternes dans des entreprises, en étant « payés » grâce aux 400 millions d’euros prévus (sur le milliard annoncé pour revaloriser la voie pro).
• La mesure 4 permettra d’adapter l’année de terminale en lien avec le projet de l’élève. S’il veut poursuivre des études, il pourra suivre un enseignement complémentaire en fin de terminale, alors que les élèves qui souhaitent accéder à l’emploi pourront effectuer une PFMP de 4 à 6 semaines après les examens. Ceux-ci, comme au LGT, auront donc lieu en mars, puis les oraux en mai…Quand on observe les effets que cette avancée a pu avoir dans les autres voies, on peut aisément anticiper un taux d’absentéisme record en LP à la fin de la terminale. Et pour les élèves les plus fragiles socialement, comment éviter qu’ils ne s’orientent vers des périodes de PFMP gratifiées de 100€ par semaine, même s’ils souhaitent poursuive leurs études, les choix sur Parcoursup étant déjà faits à cette période ?
• La mesure 7 prévoit d’adapter l’offre des formations aux besoins locaux et immédiats des entreprises. Les métiers en tension, ceux qui peinent à recruter à cause de salaires trop faibles et de conditions de travail trop difficiles, en plus d’avoir accès à une main d’œuvre gratuite et qualifiée grâce à la mesure détaillée précédemment, pourront donc également décider des formations développées sur un « bassin d’emploi ». C’est une véritable assignation à résidence sociale et géographique pour les jeunes issus des classes populaires ! Cette vision relève d’une vision archaïque et étriquée de la formation professionnelle et de nos jeunes.
• La mesure 9 prévoit de créer un bureau des entreprises dans chaque lycée. Là encore, on a une vision de la formation professionnelle au service immédiat des entreprises. Ce bureau sera le levier permettant de développer l’apprentissage dans les LP. Et c’est nier le travail déjà effectué au quotidien par les équipes dans les LP et par les DDF (Directeur Délégué aux Formations), qui sont en déjà en charge de ce lien avec les entreprises…

Mais tout cela ne sera possible qu’avec la mise en place de la mesure 10, qui prétend permettre aux professeurs volontaires d’exercer de nouvelles missions, grâce au pacte. Contrairement au premier ou au second degré, le pacte spécifique au LP est composé de 6 briques (sur 8 missions possibles), et il n’est pas sécable. Les détails sont disponibles ici : https://snuep.fr/pactelp-reforme/actualite/
C’est donc un véritable mur à 7500 € qui se lève devant les PLP et CPE pour démanteler les LP ! Le Pacte LP constitue ainsi le bras armé de la réforme. Sans ce pacte, la plupart des mesures annoncées ne peuvent pas être mises en place.

Au SNUEP-FSU, avec les autres syndicats de la FSU et en intersyndicale académique de la voie professionnelle, nous allons donc développer les actions pour dénoncer la mise en place du pacte à tous les niveaux, et pour inciter les collègues PLP à ne pas s’engager dans cette démarche de contractualisation de nos missions, qui met en danger l’avenir de nos élèves et de nos métiers en remettant en cause nos statuts. Les premiers rendez-vous sont prévus le mercredi 31 mai !

Jérôme Lenormand SNUEP-FSU Besançon